a n g é l i q ue   b o u d e t   -   i t a l i a

« En me tournant, je vis derrière moi un baiser, deux lèvres de verre posées au centre d'une buée légère, au milieu d'une île de vapeur qui rappelait lentement ses terres à elle pour les dissoudre. Et puis le baiser s'est évanoui, se confondant avec la transparence du verre, comme s'il n'avait jamais été rien d'autre qu'une idée.

Debout, derrière la vitre, Clo souriait de ce don fait et repris en un instant. J'ai rassemblé les forces qui me restaient et j'ai réussi à soulever mon corps accablé sur la chaise, comme on relève un vieillard tombé dans la rue.

Entre nous il n'y avait que l'invisible obstacle de la vitre parfaitement propre. Comme elle est belle, Clo, comme elle est jeune : la cravate desserrée et les lunettes noires témoignaient de la nuit dissolue que nous avions derrière nous, mais pas une ride n'osait lui marquer le visage, pas une pensée ne l'offusquait.

Ses cheveux tombaient droits sur ses yeux, à la hauteur des miens et du revers de la veste Fernando. Fernando qui était allé dormir – autrefois, pensais-je, il n'aurait jamais rendu les armes »

Marco LODOLI
Chronique d'un siècle qui s'enfuit




Procida 2001

  home     portefolio